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Route Overland Off Road – La Dernière Razzia d’Almanzor

J’ai toujours été de ceux qui construisent la maison par le toit, de ceux qui commencent un journal par la dernière page, de ceux qui lisent la fin d’un livre pour savoir si l’histoire en vaut la peine. C’est pourquoi, cette fois encore, commencer par une grande fin pourrait bien être un excellent début : la fin d’Almanzor.

Mais pour ceux qui ne le connaîtraient pas encore, qui était Almanzor ? Almanzor, Muhammad Ibn Abi Amir, surnommé Al-Mansur, « le Victorieux », fut le principal dignitaire du Califat de Córdoba. Il respecta les droits héréditaires du calife Hisham II, alors trop jeune pour gouverner, mais devint le grand chef militaire du Califat, utilisant le sceau royal, et fut connu sous le nom de «Sire » ou « Seigneur ». Même ses troupes l’appelaient « noble roi ». Il régna sur tous les territoires hispaniques sous domination musulmane, étant l’unique seigneur d’Al-Andalus entre les années 978 et 1002. Sa mort représente un tournant dans la domination musulmane de la péninsule Ibérique.

L’itinéraire que je vous propose est celui de sa dernière route, celle qui le mena vers Medinaceli, à travers la province de Soria. Ce parcours, exclusivement situé dans cette région, vise à relier par des chemins non goudronnés les villages que, selon les historiens, traversa Almanzor avec ses troupes.

Nous allons ainsi suivre les traces de l’armée andalousí en retraite vers Medinaceli. Le but de cette route est d’unir toutes les localités par des chemins de terre, en évitant autant que possible l’asphalte. Je vous invite à m’accompagner dans cette traversée.

Cette dernière route d’Almanzor — et notre toute première route overland — commence à Vinuesa et passe par Molinos de Duero, Mueredra, Abejar, Cabrejas del Pinar, Muriel Viejo, Muriel de la Fuente, Calatañazor, La Muela, Nafría de la Llana, Fuentelárbol, Fuentepinilla, Andaluz, la forteresse de Gormaz (même si Almanzor n’y passa peut-être pas, son intérêt historique justifie un détour), puis Berlanga de Duero, Cihuela, Casillas de Berlanga, Caltojar, Bordecorex, Rello, Barahona, Romancillos de Medinaceli, Yelo, Miño de Medinaceli, pour finir à Medinaceli.

À cette époque, en août de l’an 1002, la province actuelle de Soria était une zone frontalière, une sorte de Far West médiéval, où la souveraineté n’était ni totalement chrétienne ni totalement musulmane, et où une certaine forme de coexistence plus ou moins paisible existait. Ces terres sont donc pleines d’histoire, chaque pierre, chaque sentier en témoigne. Je vous encourage à marcher avec curiosité à travers ces contrées frontalières, et à vous imprégner de tout ce que ses chemins et ses légendes ont à offrir.

Au fil de ce parcours, nous découvrirons les richesses historiques et artistiques de chaque village, indépendamment de leur lien avec notre protagoniste. En vérité, Almanzor n’est ici qu’un prétexte pour partir à la rencontre de ces lieux de mémoire sorianaise.

Puisse cette dernière route d’Almanzor, appelée le chemin de la Yacija, être la première d’une longue série de voyages où l’histoire et les légendes deviennent des excuses parfaites pour explorer les chemins les plus reculés et sauvages de cette terre millénaire que l’on appelle aujourd’hui l’Espagne. Car tôt ou tard, comme l’Histoire nous l’enseigne, nous avons tous été, ou sommes encore, des migrants sur cette terre.

Voici maintenant un bref portrait de ce personnage historique dont la dernière route overland (pourquoi ne pas l’appeler ainsi ?) nous sert de guide. Le 11 août de l’an 1002, dans le petit village de Bordecorex, province de Soria, région de Castille-et-León, mourut Ibn Abi Amir Muhammad, surnommé Al-Mansur bi-Allah (« le Victorieux par Dieu »), connu de tous sous le nom d’Almanzor.

Almanzor exerça un pouvoir absolu sur Al-Andalus pendant plus de 20 ans. Il fut chef militaire du Califat de Córdoba et Vizir (Hayib) du calife Hisham II. Il aurait acquis son influence grâce à Subh (Aurore), épouse du calife Al-Hakam II, une chrétienne basque, fille du roi de Pampelune, mère du futur calife — et, selon de nombreuses sources, amante d’Almanzor. En pratique, il fut le maître incontesté du Califat.

Pendant son règne, il mena inlassablement des campagnes contre les territoires chrétiens du nord de la péninsule. Gouvernant avec efficacité, il offrit à ses sujets une période prolongée de paix et de prospérité.

Les chroniqueurs lui attribuent plus de cinquante expéditions victorieuses contre les royaumes chrétiens. Sa dernière campagne le mena à La Rioja, où il détruisit le monastère de San Millán de la Cogolla. Au printemps de cette même année, malade — probablement de la goutte — et blessé, il entama sa retraite vers le sud, traversant les terres sorianaises.

Harcelé par les armées chrétiennes, il décida de chercher refuge dans la ville musulmane de Medinaceli, espérant s’y rétablir. Son état força l’armée à ralentir, ce qui permit aux rois chrétiens alliés de le rattraper. À Calatañazor, dans ce que l’on appela plus tard la Vallée du Sang, les troupes andalouses furent attaquées. Bien qu’affaibli, Almanzor prit la tête de son armée dans ce qui allait être sa dernière bataille, au cours de laquelle il fut mortellement blessé.

La nuit suivante, ses troupes entamèrent une retraite vers Medinaceli, laissant leur campement intact pour tromper l’ennemi. Le lendemain, les chrétiens lancèrent une nouvelle attaque, mais ne trouvèrent qu’un camp vide et silencieux.

Bien qu’ils continuèrent à les poursuivre, les rois chrétiens, apprenant la gravité de ses blessures, lui laissèrent le passage libre jusqu’à Medinaceli, par respect pour son rang.

Almanzor fut transporté en litière couverte, caché aux yeux de ses hommes, jusqu’à Bordecorex, où il mourut. Ses généraux le portèrent ensuite jusqu’à Medinaceli, où il fut enterré. On raconte que son corps fut enveloppé d’un lin tissé par ses filles, qu’il portait toujours en campagne — prêt à mourir.

On saupoudra sur son corps la poussière qu’il avait recueillie de ses vêtements après chaque bataille pour ce moment. Il fut inhumé dans la cour de l’alcazar de Medinaceli, et sur sa tombe fut gravée cette épitaphe en marbre :

« Ses exploits te diront qui il fut,
comme si tu l’avais vu de tes propres yeux.
Par Dieu, jamais le monde ne reverra un homme tel que lui,
et jamais un autre ne défendra les frontières avec autant de bravoure. »

 

https://es.wikiloc.com/rutas-todo-terreno/ruta-la-ultima-razia-de-almanzor-soria-134822808


Posté sur 15-04-2025 | Catégorie: The Shire Overland


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